22 novembre 2024

sociologie des enfants, Martine Court

L’auteur souligne combien les voix susceptibles de porter la controverse face aux tenants des neurosciences sont rares. En effet, les travaux sociologiques sur l’enfance sont très peu nombreux. Une bizarrerie quand on sait la place importante que peut occuper l’enfant dans les travaux de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron sur la reproduction sociale ou les inégalités, par exemple. Mais cette place est théorique et statistique, puisque Pierre Bourdieu, par exemple, n’a jamais mené d’entretiens auprès d’enfants. A l’époque de Bourdieu et Passeron, et encore longtemps après, l’enfance est apparue en sciences sociales comme un territoire réservé, une chasse gardée des psychologues, résume Martine Court.

Lors qu’émergent ces premiers travaux, regroupés autour d’un label “sociologie de l’enfance”, ils se mettent plutôt à travailler sur les us et coutumes des enfants : leurs jeux, les comptines qu’ils chantent, la manière dont ils interagissent dans une cour de récréation. L’enfance n’y est pas étudiée comme un univers de frictions. Seuls de rares travaux s’esquissent, chez une poignée de sociologues qui ont biberonné à Bourdieu et Passeron et apparaissent comme des héritiers de cette sociologie critiques. Ce sera le cas, par exemple, avec Bernard Lahire sur les inégalités scolaires ou Bernard Zarca, qui évoque dès 1999 l’idée d’une conscience de classe chez les enfants.

Pour aller plus loin, vous pouvez aussi lire « L’enfance de l’ordre » de Wilfried Lignier et Julie Pagis. Deux sociologues du CNRS qui s’inscrivent dans la filiation à Pierre Bourdieu.

« L’enfance n’est pas l’expérience libre d’un monde à part, mais l’appropriation réglée du monde existant. Chacun d’entre nous, dès ses plus jeunes années, a été d’emblée pris dans un univers achevé bien avant lui, pré-structuré pré-orienté, un monde qu’il fallait apprendre à maîtriser, pour agir au quotidien, et au-delà pour se trouver une place, si possible agréable, légitime.« 

En interview, Wilfried Lignier, qui a fait sa thèse sur l’identification d’enfants « surdoués » au regard du système scolaire et des stratégies sociales des parents, explicite leur démarche :

 » La question, c’est la politisation et la conflictualisation de l’enfance. Quand on est parent, on le voit bien : regarder les enfants de 2 ou 3 ans en termes de classes sociales n’est pas hyper encourageant. On peut toujours craindre d’assigner l’enfant à la question de la domination. Cette résistance révèle le fait qu’on a du mal à associer enfant et détermination sociale. Évidemment, il serait plus flatteur et plus encourageant d’imaginer que n’importe quel enfant a l’avenir devant lui. »

« L’habitus ce n’est pas un destin, un fatum, comme on me le fait dire, c’est un système de disposition ouvert qui va être constamment soumis à des expériences et transformé par ces expériences. Cela dit, je vais tout de suite corriger… Il existe une probabilité que les expériences confirmeront l’habitus, autrement dit que les gens auront des expériences conformes aux expériences qui ont formé leur habitus. » Pierre Bourdieu

Claudia

 

Une réflexion sur « sociologie des enfants, Martine Court »

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